Au début des années 1930, Ghika fréquente Henri Laurens, Le Corbusier, Victor Brauner et Henri Matisse. De retour à Athènes, l’artiste fonde To Trito Mati (« le troisième œil »), la première revue consacrée aux arts et aux lettres. Dans cette publication inédite pour l’époque, Ghika et ses amis mettent en avant des œuvres d’avant-garde de Klee ou Kandinsky, ainsi que d’auteurs non encore traduits en grec comme Alfred Jarry ou James Joyce. Ghika lui-même figurait en bonne place dans sa revue, via plusieurs de ses essais sur la peinture. À travers cette publication, c’était donc tout l’art moderne qui entrait en Grèce, au bénéfice du plus grand nombre.
Après–guerre, Ghika est un artiste reconnu, exposant dans toute l’Europe, considéré comme le père du modernisme en Grèce. Avec sa peinture, il est le premier à avoir fait la synthèse entre la philosophie renaissante du cubisme et les profondeurs de l’art grec médiéval : renversement des perspectives, rejet de la ligne d’horizon, utilisation de camaïeux de couleurs expressifs plutôt que descriptifs… Ces choix plastiques renvoient à l’art byzantin, aux restes de mosaïque de Nazareth ou à l’église de Sainte-Catherine de Constantinople.
A partir de 1935, Ghika fait corps avec ce primitivisme tant décrié au XIXe siècle et se situe à une période charnière de son œuvre, entre la figuration matissienne et l’abstraction post-cubiste pour lesquelles l’artiste est reconnu internationalement.