Pour les deux architectes, le bâtiment de la modernité doit nécessairement intégrer des pilotis, un toit-terrasse, un plan libre et des fenêtres en bandeau. Séduit par l’enthousiasme et le sérieux de son cousin, Le Corbusier trouve également en Pierre Jeanneret un proche qui le comprend et avec qui il partage la même passion et les mêmes recherches. En ce sens, Pierre Jeanneret, bien que plus discret, joue un rôle primordial dans la réputation de Le Corbusier puisqu’il lui apporte tempérance et n’hésite jamais à l’orienter vers des formulations qu’il juge plus justes.
Dans les années 1930, tandis que Le Corbusier s’occupe beaucoup du travail théorique de l’atelier, Pierre Jeanneret supervise les travaux manuels et les réalisations techniques. Au début de la Seconde Guerre mondiale, les deux cousins se séparent pour travailler chacun dans leur propre atelier. Mais en 1951, quand le premier ministre indien Nehru propose à Le Corbusier de construire la nouvelle capitale du Pendjab, Chandigarh, celui-ci fait alors appel à son cousin, dont il connaît les compétences et surtout la patience ! Le projet est en effet monumental, puisqu’il s’agit de construire une ville complètement nouvelle ex-nihilo. Pierre Jeanneret accepte et devient l’urbaniste officiel du gouvernement indien. Il se chargera également de concevoir le mobilier des locaux de l’administration de l’Etat indien. Sa production de design s’inscrit à cette époque dans la droite lignée des idées qu’il avait formulées aux côtés de son cousin, et reprend des lignes à l’épure simple, formelle et fonctionnelle. Missionné par le premier ministre en 1951, Pierre Jeanneret reste en Inde pendant quinze ans ! L’aspect final du projet est assez spectaculaire et témoigne du souci de l’architecte de rendre compte au mieux de ses principes esthétiques tout en s’adaptant sans cesse aux particularités du paysage indien. Il collabore notamment avec l’architecte indienne Euli Chowdhury pour concevoir des pièces de mobilier, attestant de son affection pour la culture du pays et son attention à l’atmosphère locale.