Louise Bourgeois grandit en banlieue parisienne dans une famille aisée et lettrée. A la mort de sa mère en 1932, la jeune femme délaisse ses études de mathématiques pour se tourner vers l’art. A Paris, Louise Bourgeois fréquente alors plusieurs académies, dont celle de la Grande-Chaumière où Fernand Léger, qui y enseigne, la convainc de s’intéresser à la sculpture. Des années plus tard, Louise Bourgeois se souviendra : « Léger a fait de moi un sculpteur. Il a pris un copeau de bois et l’a fixé sous une étagère, d’où il est tombé en tournant librement dans l’espace. Il nous a demandé d’en faire un dessin. Je ne voulais pas en faire une représentation. Je voulais explorer sa qualité tridimensionnelle. Ce que j’ai fait. J’ai su à partir de cet exercice que je ne serais pas un peintre mais un sculpteur ».

En 1938, elle épouse l’historien de l’art Robert Goldwater et s’installe avec lui à New York. Dès cette époque, Louise Bourgeois s’initie à la gravure, dans l’atelier de Stanley William Hayter notamment, tout en continuant à peindre. Et c’est au milieu des années 1940, en récupérant des morceaux de bois sur le toit de son immeuble, qu’elle réalise ses premières sculptures. Exposée dès 1949 aux côtés des expressionnistes abstraits américains (Jackson Pollock, Mark Rothko, Willem de Kooning…), l’artiste se lie d’amitié avec Marcel Duchamp, André Breton et Joan Miró qui ont trouvé refuge aux États-Unis pendant l’Occupation nazie.

A la mort de son père en 1951, Louise Bourgeois entre dans une longue dépression, vivant quasiment recluse pendant plus de dix ans. Son grand retour a lieu en 1964 à la Stable Gallery de New York où elle dévoile un nouveau travail sculptural mêlant plâtre et latex. Puis, au tournant des années 1970, la sculptrice s’attaque au marbre et au bronze à l’occasion de voyages réguliers en Italie. En 1973, son mari décède. Sept ans plus tard, elle rencontre le jeune commissaire d’exposition Jerry Gorovoy qui deviendra son assistant et compagnon. L’artiste s’installe alors dans un grand atelier à Brooklyn, un espace qui lui permet de créer des pièces monumentales. En 1982, Louise Bourgeois fait l’objet de sa première grande exposition au MoMA, la toute première rétrospective consacrée à une artiste féminine du musée new-yorkais. En 1992, elle participe à la 9^e Documenta IX, et l’année suivant, représente les États-Unis à la 45e Biennale de Venise. En 1994, Bourgeois installe sa première araignée monumentale au Musée de Brooklyn. En 2000, la Tate Modern de Londres lui commande Maman, une autre de ses araignées monumentales. Dans la décennie qui suit, le succès international de l’artiste ne se dément pas. En 2007, le musée britannique et le Centre Pompidou lui consacrent d’importantes rétrospectives. Le 31 mai 2010, Louise Bourgeois disparaît à l’âge de 98 ans.

Son œuvre se caractérise par l’expression d’une émotivité aux forts relents psychologiques. Touche-à-tout de génie, Louise Bourgeois dissèque et explore les événements traumatisants de sa propre enfance à travers un langage visuel vite devenu iconique : spirales, araignées, cages, appendices cousus… Sombre et sexuellement explicite, son travail inclassable, réalisé sur près de huit décennies, a fortement influencé l’art conceptuel de la seconde moitié du XXe siècle. En1986, Bourgeois se confiait : « Faire un assemblage est un mécanisme de protection, ce n’est pas une attaque contre les choses, c’est s’accommoder avec elles. Mais il y a quelque chose d’autre dans l’assemblage : la restauration et la réparation. On répare la chose jusqu’à la refaire complètement… ».