Sophie Taeuber-Arp : la pionnière du mouvement Dada sur le marché de l’art
Sophie Taeuber-Arp, une figure emblématique de l’art moderne, reste curieusement sous-évaluée sur le marché de l’art contemporain, malgré sa contribution fondatrice au mouvement Dada. Alors, qui était cette artiste suisse pionnière, et comment a-t-elle influencé une ère artistique révolutionnaire tout en restant un nom précieux parmi les collectionneurs et amateurs d’art?
## Un Talent Pluridisciplinaire
Née en 1889 à Davos, Sophie Taeuber-Arp n’est pas seulement une artiste; elle est une virtuose des arts appliqués. Formée à l’École des arts décoratifs de Saint-Gall, puis en Allemagne à l’atelier d’arts appliqués de Munich, elle s’intéresse autant à la danse qu’à l’architecture, à la tapisserie qu’à la peinture. C’est cet éclectisme qui la conduit à Zurich, où elle s’immerge dans le mouvement Dada dès ses débuts en 1916.
## Dada et Engagement
Le mouvement Dada, né en réaction à l’absurdité et la barbarie de la Première Guerre mondiale, prône une philosophie anti-conformiste que Taeuber-Arp incarne parfaitement. Aux côtés d’artistes comme Tristan Tzara et Jean Arp (qu’elle épouse en 1922), elle participe activement aux performances Dada, qui mélangent poésie, musique et danse dans un chaos soigneusement orchestré.
L’une de ses contributions les plus notables reste la décoration intérieure du célèbre Cabaret Voltaire de Zurich, un haut lieu du Dadaïsme. Ses créations géométriques, inspirées de l’artisanat, contribuent à ce que l’on pourrait appeler l’ordre dans le désordre Dada.
## Un Marché de l’Art en Quête de Reconnaissance
Bien qu’elle ait joué un rôle crucial dans la naissance de l’art abstrait et fonctionnel, le marché de l’art n’a pleinement reconnu la valeur de Taeuber-Arp que récemment. En 2021, l’œuvre « Étude pour un portrait » s’est vendue 3,12 millions de dollars lors d’une vente aux enchères à Christie’s, établissant un record pour l’artiste. Cependant, cela reste modeste comparé à ses contemporains masculins, soulignant l’enjeu du rééquilibrage des reconnaissances historiques.
## Anecdote : L’Évasion par l’Art
Durant la Seconde Guerre mondiale, Sophie et Jean Arp se réfugient à Grasse, dans le sud de la France. C’est pendant cette période difficile qu’elle continue de créer, son art devenant un espace de liberté face à la montée des totalitarismes. Malheureusement, sa vie est brusquement interrompue en 1943 à cause d’une intoxication accidentelle au monoxyde de carbone.
## Un Héritage Durable
Aujourd’hui, les experts s’accordent à dire que Taeuber-Arp était en avance sur son temps, tant par son audace créative que par la diversité de ses travaux. Les institutions muséales, dont le Museum of Modern Art à New York et le Centre Pompidou à Paris, se sont attachées récemment à mettre en lumière son œuvre, organisant des rétrospectives qui déroulent le fil d’une carrière transgressive et féconde.
L’histoire de Sophie Taeuber-Arp pose ainsi une question ouverte : comment réévaluer la place des femmes dans l’histoire de l’art moderne, secteur qui, jusque-là, les a souvent reléguées au second plan? Peut-être que l’essor continu de son œuvre sur le marché de l’art contribuera à rectifier cette iniquité.