Trois ans plus tard, un conflit avec sa mère la pousse à quitter la Pologne pour Saint–Pétersbourg où sa tante et son oncle, un riche banquier, l’accueillent. En Russie, elle décide de séduire le très convoité Tadeusz Łempicki, un avocat polonais qui lui donne son nom d’artiste après la célébration de leur mariage en grande pompe en 1916. Les époux donnent naissance la même année à Maria Krystyna, surnommée Kizette, qui sera plus tard une source d’inspiration pour nombre des toiles de sa mère.
Mais la révolution bolchévique de 1917 la contraint à fuir la Russie. Elle s’exile au Danemark et parvient à faire libérer son mari qui avait été emprisonné par les révolutionnaires. De Copenhague, ils se rendent également en Angleterre pour finalement se réfugier à Paris où ses cousins se sont déjà établis.
Mais l’émigration a un coût et pour couvrir leurs dépenses, les Łempicki vendent tout ce qu’ils possèdent. Tamara doit même se résigner à travailler : elle sera peintresse avec, en sous-texte, l’objectif de venger l’humiliation qu’elle a subi en retrouvant richesse et honneur.
Pour y parvenir, l’artiste suit dès 1918 les cours gratuits dispensés à l’Académie de la Grande Chaumière par le nabi Maurice Denis et le cubiste André Lhote. Elle forge vite sa technique et son style, mélange de néo-cubisme et d’art maniériste inspirés des futuristes italiens et des avant-gardes polonaises. Sa touche unique séduit immédiatement le tout–Paris qui s’arrache rapidement ses portraits exotiques et glamour.
Dès 1923, l’artiste expose dans différentes galeries parisiennes. Mais c’est en 1925 que sa carrière prend réellement son envol, lorsqu’est organisée sa première exposition personnelle à Milan. La légende raconte qu’elle aurait achevé 28 peintures en à peine 6 mois. À partir de cette année, sa renommée internationale est acquise et la légende Tamara de Lempicka nait : incroyablement belle, moderne, amoureuse de l’hédonisme, folle des nuits parisiennes, accompagnées de ses amantes et adepte de la cocaïne. L’intrépide se lasse vite de son mari et obtient le divorce en 1928, officialisant par la même occasion la romance qu’elle vivait jusqu’alors avec le baron hongrois Raoul Kuffner.